Tract n° 20
Page de couverture :
Texte :
Des premiers pas en carrière jusqu'à sa dernière descente, chaque cataphile observe une progression dans son comportement en sous-sol. L’itinéraire emprunté passe par plusieurs phases où son attitude vis à vis du lieu, des autres individus et surtout par rapport à soi même va évoluer.
Etape
1 : Le mal de la Carrière
Tout commence par une proposition de descente. Par l’intermédiaire d’un ami ou des médias, le néophyte prend conscience de l’existence d’une ville sous la ville. Partagé entre le désir d’exotisme et la peur de l’inconnu, il se rend au rendez-vous. Devant un bar ou face à une bouche de métro, un groupe hétéroclite l’attend. Ils ont tous des tenues usées et sales, les uns portant des packs de bière à la main, les autres des sacs monstrueux sur leurs épaules. Durant la marche vers la carrière, le principal jeu est d’effrayer le nouveau, a la fois par sadisme mais aussi pour le tester et ainsi éviter qu’il ne flanche une fois à l’intérieur.
Car tous connaissent le mal étrange qui guette le néophyte : le mal de la carrière. Comme celui qui craint le mal de mer dés qu’il pose son pied sur un bateau, l’apprenti cataphile sera angoissé par l’entrée du souterrain. Ce n’est qu’une fois à vingt mètres sous terre qu’il pense aux tonnes de pierres qui le surplombe et le menace. Ajoutez à cela l’étroitesse des galeries, le dépaysement et l’impossibilité de retrouver la sortie dans ce labyrinthe infernal et vous obtenez un malaise qui s’estompera avec les heures. A la sortie, grandement soulagé d’être entier, le débutant sera heureux d’avoir survécu à une telle aventure. La plupart ne reviendront jamais et leur pas s’écarteront de la carrière. Quelques uns cependant voudront renouveler l’expérience et repartiront à l’assaut des abîmes souterrains.
Etape
2 : Soif de découverte
Enfin, le plan tant attendu est placé solennellement entre les mains tremblantes d’émotion du débutant cataphile. Les premières explorations où ce dernier prend la responsabilité de guider sont difficile : les égarements et les demi-tours sont fréquents. Rares sont ceux qui furent autodidactes en ce domaine, apprendre à se diriger en carrière n’est pas évident. Mais l’excitation de la découverte d’un nouveau monde est énorme : il y a tant de choses à voir que les descentes dépassent bien souvent la durée voulue. A ce stade, le cataphile s’intègre souvent à un groupe d’amis qui le verra évoluer. C’est le commencement pour certains du désir d’être reconnu par ses pairs.
Etape
3 : Faim de reconnaissance
Les relations sociales entre individus ne sont pas tant éloignées de ce qui se fait en surface. Une sorte de hiérarchie basée sur l’ancienneté s’établit en carrière. Un autre facteur joue : le degré d’informations du cataphile. Celui qui dévoile des secrets en tire un certain prestige et attend en retour d’autres confidences. Mais tout n’est pas toujours vrai! La rumeur est l’outil de travail du cataphile sociable. Les intox comme les infos se répandent en un éclair dans les galeries. Et celui qui manipule sait mieux que quiconque qu’il faut douter de chaque renseignement. La culture du secret en carrière n’est qu’un leurre, toute info est bonne à dire et le cataphile s’il veut exister aux yeux des autres, se doit d’en faire son fond de commerce.
Le cataphile commence donc par claironner son pseudo à chaque rencontre, mais comme personne n’en a jamais entendu parler, on le prend de haut. Sans se décourager, il réalise des tracts de plus en plus élaborés, participe à des travaux d’aménagement, tente de rencontrer plus connu que lui, discute sur Internet ou bien crée un site. Tout cela dans le but de s’affirmer auprès de ceux qui se comportent comme des stars. Ça y est, il s’est tellement impliqué, il a tant passé de temps sous terre, que ses efforts sont récompensés : la faune souterraine l’identifie comme un des siens. Heureux d’avoir atteint ce statut, il descend sans arrêt pour pouvoir en jouir. Ainsi, il devient accro aux carrières.
Etape
4 : Dépendance
La
carrière répond à un besoin de s’isoler du monde extérieur. Le cataphile,
s’y réfugie pour échapper aux problèmes de la surface. Et cela pour mieux
aller à la rencontre d’une expérience nouvelle. La fréquentation de la
carrière peut s’assimiler à une drogue douce. Elle exerce une dépendance
psychologique. Le sentiment de découverte s’émousse au fur et à mesure de
la maîtrise le lieu. Le cataphile reste de plus en plus longtemps sous terre
pour retrouver la même sensation qu’auparavant.
Etape
5 : Sevrage
Le temps est venu où le cataphile prend conscience que sa vie souterraine
accapare peu à peu son existence en surface. Sa passion le consume et depuis
longtemps il a sacrifié amis, vie sentimentale et vie professionnelle. Sentant
venir l’overdose de carrière, il décide brusquement de réintégrer son
ancienne existence et ne descend plus qu’a l’occasion. Il ne renie pas pour
autant son passé, il est simplement sevré.
Fin
de Carrière
Cette progression cataphile n’est qu’un exemple qui ne saurait s’appliquer à chaque individu. Peut être en cherchant un peu vous parviendrez à vous y reconnaître, du moins en partie. Alors cela signifie sans doute, que vous partagez cette passion d’au-dessous terre qu’est la cataphilie avec d’autres « amis de ce qui est en bas ».
« Il est difficile de vaincre ses passions, et impossible de les satisfaire » Mme de la sablière
Dédicace à
Zanka, Elie, Benjam, Gontrand, Globe, Brewal, l’Hermine, Mickey, Krevette,
Marmotte, Mescalito, Konogan, Papy, H20, Virginie, Gilles, Pm, Vax,
Dash, Béa, Morthicia, Naj, lybbie, Gizmo, Gandalf, aux Electrons Libres et aux
Ktagones.
Descendez couvert, portez un
casque. Le tract
à Superflux n° 20.
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